Dans le cadre de la réforme visant à la suppression de certains tribunaux, LREM envisage de favoriser le maintien des tribunaux dans les villes gérées par des maires LREM selon les résultats électoraux 2020…
Pour pouvoir mieux faire pression?
Vent de fronde sur la Chancellerie. Les syndicats de magistrats sont montés au front mercredi pour exprimer leur « consternation » et leur « stupéfaction ».
Dans leur viseur, une note, dévoilée par Le Canard enchaîné, dans laquelle la Chancellerie envisagerait de corréler le maintien ou la suppression des postes de juges et les résultats électoraux de LREM aux municipales 2020. Selon l’extrait de cette note « confidentielle » publié par l’hebdomadaire satirique, le ministère de la Justice a sollicité « une réunion » avec l’un des conseillers du Premier ministre et « les experts des élections municipales » de La République en marche pour connaître les villes potentielles « cibles électorales » et ainsi « différer les annonces » de la réforme de la carte judiciaire.
En clair : le cabinet de la garde des Sceaux veut jauger où il serait plus judicieux de supprimer tel ou tel juge d’instruction, comme le permet la réforme promulguée au printemps dernier, quand il y a plusieurs tribunaux dans un département. Et pour avoir un panorama complet, la chancellerie a même dressé un tableau contenant 72 tribunaux, la couleur politique de leur commune, ainsi que les résultats d’Emmanuel Macron à la présidentielle, et de LREM aux législatives et aux européennes.
« Consternée », l’USM (Union syndicale des magistrats, majoritaire) a dénoncé dans un communiqué « la mainmise du politique sur l’organisation de la justice, totalement inacceptable dans une démocratie digne de ce nom », et pilonné une « scandaleuse instrumentalisation de la réforme de la Justice à des fins électoralistes ». L’USM « exige » par conséquent « que tous les projets de suppression fassent l’objet d’un argumentaire détaillé, en toute transparence et en concertation avec les acteurs locaux de la justice ». Le Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche) a lui exprimé sa « stupéfaction » face à cette nouvelle organisation menée « en catimini et au mépris de l’indépendance de la justice » et réclamé dans une lettre ouverte des explications à la garde des Sceaux, Nicole Belloubet.
Pas de « favoritisme » pour Nicole Belloubet
Invitée mercredi matin de Sud Radio, la ministre n’a pas démenti l’existence de cette note et s’est défendue de tout « favoritisme ». « Lorsque nous avons à mettre en place une réforme, (…) évidemment elle doit être effectuée sur la base de critères objectifs. Mais toute réforme doit être acceptée et elle doit faire l’objet d’une acceptabilité et dans ce cas-là il est évident que nous nous appuyons également sur les élus pour expliquer, pour faire comprendre, c’est ce que veut dire cela (cette note) », a déclaré Nicole Belloubet.
La confusion entre les intérêts de l’État et les intérêts politiques de LREM est totale.
« Avec ce qu’on découvre (…), c’est la fin du mythe de la République exemplaire, remplacée définitivement par la République des copains. Les Français disposeront de tribunaux selon qu’ils votent bien ou mal », a réagi auprès de l’Agence France-Presse Pierre Jouvet, chargé des élections au Parti socialiste (PS).
Sources : Médiapart, Le point.